Bonheurs artficiels
J’aime le
silence. En fait, non, je déteste le bruit. Il y a quelque chose en moi qui se
serre quand les gens parlent trop fort, rient trop fort, chantent trop fort, que
du vacarme et ça me dérange. La quiétude des matinées me séduit par l’absence
de ces groupes nocturnes trop bavards et avares de leurs propres histoires, de ces
fêtards qui étirent le malaise jusque dans leurs verres pour se sentir vivants
et oublier le lendemain.
Enfant, ado, adulte,
j’ai toujours recherché les zones sans vie, des refuges où seules les voix dans
ma tête faisaient écho au vide. C’est ça, le vide, le néant, la quête du calme.
L’âme paisible qui s’évade dans l’univers des discrets, dans le monde des effacés.
Et pourtant, malgré
tout l’inconfort qui vient avec l’assourdissement, je me laisse quand même chavirer
par ces booms qui cassent le ciel assombri et bousculent la nuit noire. Au
premier sifflement invisible, mes poils s’hérissent et ma nuque frissonne à l’idée
de découvrir la couleur du premier éclat de lumière. Ce moment à quelque chose
de féérique, comme si le temps arrêtait d’avancer pour exploser en une constellation
d’étoiles éphémères. Peut-être aussi que je les adore parce qu’ils étouffent les
criards autour et rendent muets les cancaniers. Ils résonnent si fort en moi qu’ils
réaniment mon cœur qui ne bat plus depuis trop longtemps. Je les aime depuis le
château des contes de fées, là où les princes existent et les oiseaux chantent.
Ils me rappellent
l’enfance et le goût de l’innocence surtout quand je sens l’odeur de leurs brumes
polluantes. Ils fument mes pensées sans saveurs et éclairent mes sentiments
égarés. Je les regarde avec la sensation d’une main qui tient la mienne et qui
me répète que tout ira bien. Le souvenir d’une mère qui cherchait à être émerveillée,
elle aussi, et qui nous réveillait les nuits de fête nationale pour déambuler dans
les rues endormies, doudou au cou, pantoufles aux pieds, pour vivre ce moment parfait,
trop court. Dans mon regard, il y a le sien, maintenant éteint, qui s’illumine.
Je me demande encore si les larmes qui lui coulaient le long des joues étaient dues
au ravissement ou aux souvenirs d’un prince sans charme fuyant.
J’admire la beauté
de ces lueurs bienveillantes remplies d’espoir. Et puis, la nostalgie glisse
sur mes joues, les feux du ciel s’éteignent, la vie reprend son rythme trop
bruyant et je cours m’isoler jusqu’au prochain spectacle des bonheurs
artificiels.
Maude Racicot
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